La vie est étrange tout autant qu’elle est cruelle et belle à la fois.
Pour de bien bêtes raisons, les chemins que nous prenons en tant qu’adultes font que trop souvent nous perdons le fil de personnes que nous apprécions pourtant. On s’éloigne aussi et naturellement du lieu qui nous a vu naître et grandir… Et les distances deviennent bien plus grandes qu’elles ne le sont, un oubli dans lequel on se drape.
De mon adolescence où j’ai commencé le hautbois, je garde de beaux et bons souvenirs de cette jeune femme qui à l’époque me donnait des cours de solfège avec mes camarades, rue Marle à la Chappelle d’Armentières. Elle n’était pas beaucoup plus âgée que moi. 3 ans je crois. Il était difficile de ne pas être charmé par elle et son beau sourire. Elle jouait très bien de la flûte traversière et – pour cette toute petite école de musique – elle était un peu un modèle à suivre avec son entrée et son parcours au conservatoire, que ce soit celui de Lille ou Boulogne Billancourt. J’ai souvent repensé à certains passages en duo à l’harmonie, lors des concerts de printemps ou de Sainte Cécile. Une pression intérieure me poussait à assurer ma partie et ne pas ainsi gâcher la sienne. De ces concerts, je retiens surtout celui où nous avions joué à Birchington en 1991, au Royaume-Uni, dans une immense salle de concert aux trois quarts vide. La scène était grande elle aussi et nous étions tous éloignés les uns des autres. C’était bien différent des conditions qui étaient les nôtres lors des répétitions hebdomadaires… Et malgré cette distance lors du concert, j’ai eu le sentiment de jouer vraiment à l’unisson, au sens noble du terme : celui d’un même battement de coeur pour la musique, d’une même respiration.
J’ai ressorti ce matin une vieille cassette audio. Je vous laisse imaginer les ravages du temps sur cette bande magnétique et sur ma mémoire. Ce n’est peut-être pas aussi beau que dans mon souvenir. Mais je serai content si vous l’écoutez malgré tout. J’avais 3 ans de hautbois derrière moi.
Ce matin, j’avais un peu de nostalgie et de curiosité à savoir ce que tu étais devenue, quel avait été ton chemin après toutes ces années. J’aurais bien aimé reprendre contact et jouer ensemble un jour prochain, maintenant que j’ai un peu progressé. Mais je ne m’attendais pas, Paola, à découvrir que tu étais morte depuis 2019, à 47 ans…
La vie est étrange tout autant qu’elle est cruelle et laide parfois.